Pour ce troisième fil #GrammaireAnglaise, on reste avec le modal MAY pour le comparer avec CAN dans son sens de permission : qu’est-ce qui les distingue ? On considère généralement que MAY est plus « poli » que CAN, mais pourquoi en est-il ainsi ?
MAY et CAN expriment tous deux une possibilité et leur valeur de permission, illustrée ci-dessus, relève de la modalité radicale : il s’agit de viser la réalisation d’un événement. Si j’autorise quelqu’un à faire quelque chose, c’est a priori en vue qu’il ou elle le fasse.
Ceci étant posé, MAY et CAN se distinguent par le type de modalité radicale dont ils relèvent : MAY ressortit à la modalité déontique, CAN à la modalité dynamique.
En modalité déontique, l’avènement du procès dénoté par le verbe dépend d’une instance extérieure au sujet de l’énoncé. Dans cette vignette déjà citée la semaine dernière, la possibilité de retourner en classe est conférée au sujet « you » (Calvin) par l’énonciateur Mr Spittle.
En modalité dynamique au contraire, la réalisation du procès dépend du sujet de l’énoncé lui-même. Cela est le plus évident dans la valeur de capacité du modal CAN : ici la possibilité de créer des ombres chinoises appartient en propre au sujet « I ».
Cela crée une différence fondamentale dans l’interprétation « permission » de ces deux modaux…
En tant qu’il dit explicitement que la possibilité est conférée au sujet par un autre, MAY crée un rapport de type hiérarchique entre la personne qui donne la permission et celle qui la reçoit.
A la forme interrogative, la personne qui demande la permission se place donc explicitement sous l’autorité de son interlocuteur. Ce rapport de soumission n’existe pas avec CAN, qui place les deux instances sur un pied d’égalité.
C’est cela qui explique la réaction de Calvin dans le premier strip, avec « my » en caractères gras : qu’un adulte lui demande une permission en se plaçant sous son autorité lui semble incongru.
C’est aussi cela qui explique la déception de Calvin dans le deuxième strip : en demandant la permission avec CAN, il estimait que celle-ci lui serait automatiquement octroyée, or sa mère joue de son autorité pour s’opposer à sa requête.
Cette différence MAY = relation d’autorité / CAN = relation d’égalité se perçoit nettement dans la façon qu’a Calvin de demander une permission à sa maîtresse Miss Wormwood par opposition à sa mère :
On voit donc que c’est cette même différence qui explique l’effet de sens de « politesse » de MAY dans une demande de permission, car MAY indique que l’énonciateur se soumet à l’autorité de son co-énonciateur (son interlocuteur).
Pour terminer, un détour par le cinéma. Dans Jackie Brown de Quentin Tarantino, Jackie se trouve dans le bureau du policier Mark Dargus quand elle allume une cigarette.
Dargus: I didn’t hear you ask permission to smoke in my office.
Brown: May I smoke?
Dargus: No, you may not.
Cet emploi de MAY est fait pour sonner faux et ironique, car trop formel. Je vous laisse apprécier la traduction :
Dargus : Vous m’avez demandé la permission de fumer dans mon bureau ?
Brown : Puis-je fumer ?
Dargus : Non, tu puis-je pas.
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