Retour sur une distinction fondamentale en grammaire : si vous aviez l’habitude de parler (ou d’entendre parler), par exemple, du présent simple, du présent « continu » (terminologie obsolète) et du present perfect comme différents « temps », voici l’occasion de remettre un peu d’ordre dans les différentes formes verbales de l’anglais.

Toutes les formes conjuguées du verbe anglais résultent de la combinaison d’un temps et d’un aspect.

1. Le temps

Pour faire vite, on appelle « temps » la catégorie grammaticale, marquée dans la morphologie du verbe, grâce à laquelle on situe un procès dans une chronologie. En français, on peut ainsi conjuguer un verbe au présent, au passé ou au futur pour signaler que le procès a lieu au moment de l’énonciation, a déjà eu lieu, ou aura lieu dans l’avenir.

Bien sûr, je n’évoque là que les emplois les plus élémentaires des temps, qui font coïncider (première distinction fondamentale) temps grammatical (forme verbale) et temps chronologique (celui dont on fait l’expérience en tant que sujets conscients). En effet, on sait bien qu’on peut évoquer l’avenir chronologique grâce au temps grammatical présent (« Il fait quel temps demain ? ») ou le présent chronologique grâce au temps grammatical passé (« S’il faisait beau j’irais faire un footing. »).

Et là, première constatation de taille, l’anglais n’a que deux temps grammaticaux dans sa morphologie : le passé, et le présent. Pas de futur morphologique en anglais (impossible de conjuguer un verbe au « futur »), qui se sert la plupart du temps pour évoquer l’avenir du… présent, quitte à employer des périphrases telles que l’auxiliaire modal WILL au présent suivi du verbe à l’infinitif, ou le verbe GO au présent en BE + V-ING suivi de TO + V-INF. Certaines grammaires donnent d’ailleurs plus justement au présent le nom de « non-passé ».

On trouve donc deux conjugaisons du verbe en anglais : une forme « nue » du présent (sauf -s à la 3e personne du singulier), et une forme « -ED » du passé (notation qui recouvre aussi, évidemment, les verbes irréguliers).

2. L’aspect

Si le temps grammatical sert (en gros) à situer le procès dans le temps chronologique, l’aspect consiste à marquer le point de vue de l’énonciateur sur le procès lui-même. Il existe une foule d’aspects, selon que l’énonciateur envisage le début, le déroulement, la fin, etc. du procès, mais l’anglais en marque trois dans sa morphologie verbale :

  • l’aspect perfectif, dit aussi aspect « zéro » parce qu’il ne marque justement aucun point de vue particulier sur le procès, qui est envisagé de façon globale, dans son entièreté ;
  • l’aspect imperfectif (ou inaccompli), qui correspond à une saisie du procès dans le cours de son déroulement ;
  • l’aspect résultatif, qui correspond à un regard de l’énonciateur sur la suite immédiate de l’achèvement du procès.

Ce sont ces trois aspects qu’on retrouve sous les formes simple, BE + V-ING et HAVE + V-EN du présent et du passé.

Les formes verbales de l’anglais sont donc le résultat de combinaisons entre temps (grammatical) et aspect qui se laissent représenter sous la forme du tableau suivant :

Synthèse

Ces huit formes possibles du verbe anglais ne sont donc pas autant de « temps ».

Les quatre formes de présent ont en commun la pertinence du procès au moment de l’énonciation ; même au present perfect, ce qui compte n’est pas le procès passé lui-même, mais la trace qu’il laisse au moment présent — c’est donc bien une forme du présent, comme son nom l’indique.

Et les quatre formes de passé transposent les mêmes valeurs aspectuelles à des procès repérés dans l’antériorité du moment de l’énonciation. (Le dernier exemple (hadn’t been acting) diffère par son interprétation modale hypothétique, mais c’est parce que c’est le seul exemple de HAD BEEN + V-ING dans mon corpus !)

Pour quelques analyses de certaines de ces formes, n’hésitez pas à aller lire :

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