[pʀɑ̃dʀəlɑ̃ɡ]

26. MIGHT

Chose promise, chose due, nouveau billet #GrammaireAnglaise. Car comme le dirait à peu près Fabrizio Bucella, la grammaire peut tout — grammar is almighty… y compris, qui sait, permettre de dépasser cette façon d’enseigner MIGHT :

La première chose à débunker va aller vite : MAY/MIGHT n’expriment pas une probabilité mais une possibilité, ce qui se comprend nettement par une simple paraphrase à l’aide d’une extraposée.
‘The shop may be open’ = ‘It is possible/*probable that the shop is open’.

Nous allons donc nous concentrer sur la deuxième chose, l’idée répandue selon laquelle MIGHT exprime une moindre possibilité que MAY : c’est au mieux inexact, voire franchement faux.

Comme COULD, SHOULD et WOULD, MIGHT est un auxiliaire de modalité conjugué au passé — MAY + -ED, ce qui implique que son sens résulte de la combinaison de celui du modal avec celui du passé, en relation avec son contexte d’emploi.

La valeur fondamentale de MAY est l’équipossibilité.
En emploi épistémique, où l’énonciateur évalue les chances de validation de la relation prédicative (c’est-à-dire, en gros, que la phrase soit “vraie”), on dit en effet que ces chances sont égales à celles de non-validation :

Ci-dessus, pour Hobbes, Calvin a “50%” de chances d’avoir raison. Bon, ce n’est pas si simple, car si c’était vraiment moit’-moit’ un énoncé négatif aurait la même valeur qu’un énoncé positif, or ce n’est pas le cas — enter “la présupposition”, mais ça sera pour une autre fois.

En emploi radical, c’est-à-dire quand l’énonciateur vise la réalisation d’un procès, équipossibilité itou : MAY exprime le plus souvent une permission, ce qui revient à donner à quelqu’un le choix de faire ou de ne pas faire quelque chose.

Contrairement à l’explication donnée dans la vidéo au début de ce fil, MIGHT ne remet pas en cause cette équipossibilité. Pour le comprendre, penchons-nous sur les valeurs possibles du prétérit de MIGHT.

1ère valeur possible, la valeur chronologique : il s’agit de situer le procès dénoté par le verbe dans un passé révolu, détaché du moment présent.
🚨 MIGHT n’a pas d’emploi chronologique !

2e valeur possible (que certain·e·s linguistes ne distinguent pas de la 1ère), la translation. C’est le prétérit qu’on utilise dans le discours indirect pour rapporter des propos tenus dans le passé, comme ci-dessous avec ‘he […] said I might…’ :

3e valeur possible, l’irréel — et c’est celle-là qui nous intéresse le plus, car c’est ce cas qui est souvent expliqué en termes de possibilité moindre, “40%” voire moins.

L’irréel consiste à placer la validation de la relation prédicative ou la réalisation du procès sur un plan fictif, en rupture avec la situation repère. Ainsi, on trouve notamment le prétérit dans les énoncés hypothétiques, où l’énonciateur imagine des faits… alternatifs :

Associé à MAY pour former MIGHT, ce prétérit ne change pas magiquement de “programme” pour devenir un marqueur de degré… Avec MIGHT = MAY + -ED, il s’agit pour l’énonciateur de placer son jugement d’équipossibilité (MAY) sur un plan fictif (-ED).

On le trouve donc naturellement dans des énoncés hypothétiques, comme ci-dessous (3e vignette) :

Ce que dit Hobbes dans la 1ère vignette ci-dessous, c’est donc que dans l’hypothèse où il rencontrerait la bonne personne, il y aurait autant de chances qu’il l’épouse que de chances qu’il ne l’épouse pas.
On voit bien que ce n’est pas une question de degré de possibilité.

A partir de là, on peut comprendre comment MIGHT est utilisé pour exprimer une possibilité qui entre en conflit avec les données de la situation d’énonciation.

Dans le strip ci-dessous où C&H s’apprêtent à tenter de franchir un ravin à bord de leur luge — à condition d’éviter des rochers, la possibilité qu’ils s’en tirent indemnes est tout ce qu’il y a… d’hypothétique :

Ci-dessous, le père de Calvin sait très bien que son fils n’a habituellement aucun appétit pour les histoires qu’il lui lit au coucher : MIGHT exprime cette surcharge hypothétique, qui confine d’ailleurs à une variante de l’irréel qui est le contrefactuel.

Le contrefactuel consiste pour l’énonciateur non plus à imaginer une situation seulement différente, mais franchement à l’opposé de la réalité. C’est cette valeur que l’on trouve dans l’extrait suivant :

Mais au fond, c’est toujours la même chose !
👉 Pour résumer : non, MIGHT n’exprime pas un degré moindre de possibilité (“40%”) par rapport à MAY (“50%”).
MIGHT sert à l’énonciateur à porter un jugement d’équipossibilité fondé sur des circonstances situationnelles fictives.

Fin du billet, j’espère qu’il vous aura été utile, et n’hésitez pas à réagir, liker, partager !

4 Comments

  1. Michael

    A mon oreille américaine au moins, “might” peut très souvent remplacer “may” sans changer le sens de la phrase, tandis que l’inverse n’est pas le cas. “Might” peut exprimer ou non le contrafactuel, selon le contexte, tandis que “may” n’a pas ce sens contrafactuel. Le seul sens que je vois où “might” ne peut pas marcher est la permission. (il ne s’agit en aucun cas de degré de probabilité, et c’est la première fois que j’entends cette explication).

    Quand Hobbes dit ci-dessus “hmm, you may be right” ou Calvin dit “this may not work out”, “might” ferait aussi bien l’affaire sans changer le sens. Par contre, quand Mr. Spittle donne permission de rentrer “You may return to your room”, substituer “might” changerait le sens de donner permission à une attente/suggestion/demande un peu sarcastique.

    • F. Moncomble

      Merci pour vos observations, auxquelles je souscris tout à fait : l’énonciateur à tout à fait la possibilité d’exprimer un surcroit d’hypothèse en substituant MIGHT à MAY. Cela ne change rien au fonctionnement de base du prétérit : il s’agit de mettre la possibilité sur un plan fictif, hypothétique.
      Du reste, il y a de la variation dialectale que je ne pouvais pas aborder dans un simple billet. Par exemple, dans ma variété d’anglais (irlandais), MIGHT est nettement plus fréquent que MAY.
      Sur l’emploi radical, vous avez raison également : la permission exprimée par MAY se mue en suggestion avec MIGHT, laquelle peut en effet charrier un effet de sens ironique voire passif-agressif !

  2. Axel

    Merci pour votre article, est-ce que vous pourriez recommander une lecture pour en apprendre davantage sur les modaux en anglais ?

    • F. Moncomble

      Bonjour et merci pour votre lecture. La réponse à votre question dépend du niveau d’approfondissement désiré, mais pour un minimum de spécialisation sans pour autant se frotter à l’état de la recherche sur la question, mieux vaut aller vers les grammaires linguistiques qui sont sur le marché : Grammaire explicative de l’anglais, Linguistique anglaise par exemple.

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